Réduire au silence la lutte contre le VIH-sida c’est détruire des vies. Act Up-Paris mène ce combat à travers une lutte pour la visibilité, pour affronter collectivement la stigmatisation avec nos mots, nos corps, nos existences. Notre lutte vous dérange, nos identités vous gênent, vous voulez nous faire taire par tous les moyens. Pour cela, vous avez débloqué des moyens importants.
Sur les militantEs de la lutte contre le VIH-sida vous avez envoyé votre police, vous avez empoisonné des séropos avec vos gaz lacrymogènes, vous avez frappé des corps malades et/ou handicapés avec vos matraques. Vous avez conduit nos militantEs devant les tribunaux pour avoir alerté sur les conséquences de vos politiques libérales dans l’épidémie du SIDA. Vous nous avez attaqué quand nous dénoncions votre homophobie meurtrière, votre racisme, votre putophobie, votre haine intolérante envers tout ce qui fait notre communauté.
Aujourd’hui, nous faisons face à une nouvelle forme de censure, celle dictée par les géants du numérique soutenus par les gouvernants. Depuis plus d’un an notre page Facebook est censurée. Nous pouvons toujours publier notre contenu mais lorsqu’unE utilisateurRICE souhaite le partager voici ce qu’on lui répond : « impossible de partager votre contenu, car ce lien enfreint les Standards de la communauté. Si vous pensez que ceci ne va pas à l’encontre des règles de la communauté, dites-le nous ». Le contenu de prévention sur les IST et le VIH-SIDA, les permanences Droits Sociaux pour les Seropos, les cris d’alertes que nous lançons sur la précarité des travailleurSEs du sexe ou les difficultés d’accès aux soins des réfugiéEs ne feraient pas partis des « Standards de la communauté » ? Si c’est le cas votre communauté a du sang sur les mains, le sang des mortEs du SIDA. Nous ne pouvons voir autre chose qu’une nouvelle volonté de nous censurer et de nous réduire au silence. Depuis le début du confinement, nous ne pouvons plus descendre dans la rue pour diffuser nos messages ni informer directement sur le VIH-sida auprès des publics clés. Il nous reste les réseaux sociaux pour continuer à faire vivre l’autogestion communautaire et lutter contre le VIH-sida et le COVID-19.
Mais comment faire quand Facebook nous censure ? Comment continuer à jouer notre rôle de lanceur d’alerte sur les combats que nous menons ? Comme Facebook nous le recommandait, nous avons signalé le blocage de notre page, en montrant que notre contenu n’était pas contraire aux « Standards » mais cela n’a rien changé. Cette censure ne concerne pas qu’Act Up-Paris, mais de plus en plus de contenus produit par nos camarades syndicalistEs, lanceurSEs d’alerte, militantEs politiques ou associatifVEs, artistEs… Cette censure ne semble pas déranger le gouvernement qui veut donner encore plus de pouvoir à ces plateformes numériques comme le souligne la loi de « lutte contre les contenus haineux sur internet », dites aussi loi Avia et portée par la députée LREM du même nom, aujourd’hui en cours d’adoption.
Si cette loi est votée, les réseaux sociaux pourront jouer aux gendarmes du web, en appliquant leur propre justice. En effet, ces plateformes numériques auront 24h pour retirer tout contenu « manifestement illicite », suite à un signalement, au risque de lourdes sanctions financières. Le jugement de la légalité ou non d’un contenu relèvera uniquement de ces plateformes et non plus de la justice. Nous craignons une atteinte grave à la liberté d’expression des populations opprimées, car il sera plus simple pour ces plateformes de supprimer un contenu licite mais jugé illicite que de garder un contenu qui s’avèrerait illicite et entraînerait une sanction financière. Aujourd’hui le contenu LGBTQI+, de même que celui relatif au travail sexuel est fortement freiné sur les réseaux sociaux et bien souvent censuré (ex: couv de Barbara Butch). Dans le même temps, les discours LGBTphobes, grossophobes, racistes, islamophobes se voient offrir d’immenses tribunes par des médias complaisants pour que les Éric Zemmour, Alain Finkielkraut, Ludovine de la Rochère, Élisabeth Lévy et autres délinquantEs viennent déverser leurs paroles assassines et fascisantes.
L’application de cette loi viendra encore plus écraser nos mots et nos existences. Devrons-nous parler de préventions sexuelles sans parler de sexualité ? Alerter sur la précarité que subissent les travailleurSEs du sexe sans parler de travail du sexe ? Dénoncer la répression que subissent les usagerEs de drogue sans parler d’usage de drogue ? Nous ne céderons pas au langage contradictoire que souhaite nous imposer Matignon.
Pour toutes ces raisons Act Up-Paris exige :
- Le déblocage immédiat de la page Facebook d’Act Up-Paris
- Le retrait de la loi Avia
- La garanti des libertés fondamentales et du droit à l’information pour protéger les lanceurSEs d’alertes.