Au Kenya, alors que trois laboratoires nationaux ont démarré la production d’ARV (antirétroviraux) génériques et que les laboratoires indiens sont prêts, leurs médicaments sont toujours en attente d’être enregistrés.
Pourtant, en juin 2001, après une bataille de longue haleine très médiatisée, la Coalition pour l’accès aux médicaments essentiels avait convaincu les députés d’autoriser l’importation de médicaments génériques. La loi sur les médicaments anti-sida permettait ainsi aux Kenyans d’importer des génériques d’ARV directement et à bas prix, ce qui empêchait du même coup les grands groupes pharmaceutiques internationaux de s’y opposer. La loi n’est entrée en vigueur qu’en mai 2002, mais cinq semaines plus tard un amendement voté en catimini, noyé parmi d’autres et sans les membres de la Commission santé de l’Assemblée nationale, a annulé tout simplement le sens même de cette loi.
Mais l’ajout d’une phrase indiquant que les compagnies qui désirent importer des génériques au Kenya doivent en demander l’autorisation préalable aux propriétaires des brevets, n’est pas passée inaperçue. Personne pourtant ne veut s’avouer coupable ; le Ministre de la Santé publique s’est disculpé et a disculpé le Ministre du Commerce et de l’Industrie ; le service du Procureur Général, chargé de la rédaction des projets de loi du gouvernement, s’est déclaré lui aussi irréprochable. Des responsables de la Coalition, des sources judiciaires et parlementaires ont accusé certains groupes pharmaceutiques internationaux d’avoir fait pression sur des hauts responsables du gouvernement kenyan afin de faire passer cet amendement. Ce n’est que le 8 août dernier et après une nouvelle campagne de protestation que les militants de la lutte contre le sida au Kenya ont pu savourer leur victoire : l’amendement a été retiré.