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La surinfection est un sujet à controverses. C’est d’abord l’histoire d’un serpent de mer : tout le monde en parlait sans jamais l’avoir vu.

Une surinfection est une deuxième infection chez une personne pour qui une première infection au VIH a été dépistée, avec un virus du même sous-type que l’infection primaire, ou par un virus d’un autre sous-type (avec la présence possible de mutations de résistances différentes).

Mais depuis la conférence de Barcelone en juillet 2002 et la description de plusieurs autres cas, beaucoup de questions sont posées, non plus en hypothèses théoriques, mais comme implications directes dans les recherches actuelles. On se demande si le comportement des scientifiques vis-à-vis de la surinfection n’a pas été d’éluder la question :  » rien ne prouve que la surinfection existe, faisons comme si elle n’était pas possible « . Sa démonstration récente fait donc des vagues et soulève pas mal d’inquiétudes. Cela relève de la tendance qu’a eu cette même communauté scientifique en 1996 lorsque les antiprotéases ont fait rêver à l’éradication du virus. C’était un vœu, mais pas la réalité. La surinfection était redoutée, mais on n’osait y croire ; pourtant elle est là.

sortie de l’ombre

On soupçonnait qu’elle était possible depuis que l’on sait que le virus mute, avant même que les traitements n’existent. Puis les médicaments sont arrivés, et des mutations ont commencé à s’exprimer, sous la pression médicamenteuse, chez un nombre grandissant de malades. Aujourd’hui on suit à la loupe les mutations des virus en fonction des médicaments. L’une des implications scientifiques principales porte sur la recherche d’un vaccin efficace. La question est posée depuis longtemps : à quel stade la réponse immunologique au vaccin sera-t-elle assez large pour empêcher l’infection par le VIH, dans une stratégie de vaccin préventif ? Les chercheurs observent les mutations et cherchent des  » cibles « , des parties du virus qui sont communes au plus grand nombre possible de sous-types. Le fait que les malades puissent être surinfectés avec des virus différents implique que le vaccin doit être  » très  » efficace.

prévisions

L’autre implication touche à la thérapeutique des malades. Les malades peuvent avoir des virus qui vont muter dans leur organisme et développer des résistances aux médicaments, mais ils peuvent également être victimes de ces résistances en étant contaminés par des virus qui auront muté chez d’autres malades. Les craintes quant à la réalité de la surinfection ont été renforcées lorsque les premiers cas de virus résistants ont été trouvés chez des malades en primo-infection, naïfs de tout traitement. Si eux pouvaient être contaminés par des virus résistants, pourquoi les séropositifs seraient-ils épargnés ? Ils ne le sont pas, la preuve est faite. Mais certains avaient déjà anticipé la surinfection : les investissements des laboratoires pharmaceutiques dans des traitements efficaces contre des virus mutés ne sont pas le fruit d’une philanthropie surprenante. Les industriels ont compris qu’ils devaient fournir des molécules de plus en plus performantes. Il ne s’agit pas de  » fidéliser  » les malades en échappement, car cela représente encore un marché trop restreint. Les nouveaux séropositifs dans les pays où les médicaments sont disponibles ont plus de risques d’être contaminés par des virus mutés que par des virus dits
 » wild type « , c’est-à-dire sauvages : il y a tout de même plus de séropositifs en échappement que dans les pays pauvres, où tout le monde meurt faute de traitements.

prévention

Enfin, l’implication très pragmatique de la mise en évidence de la surinfection, c’est la nécessité de maintenir des précautions dans les rapports sexuels des séropositifs, ou d’y revenir pour ceux qui les délaissent. Certains séropositifs  » barebackers « , refusant l’usage du préservatif, justifient leur comportement en arguant qu’ils n’ont de rapports sexuels qu’avec d’autres séropositifs. Aujourd’hui, cet argument est solidement réfuté : même quand on est séropositif, on peut se surcontaminer, et même si son partenaire est déjà séropositif, on peut le contaminer.