Jacques Chirac et les chefs d’états de l’Union Européenne viennent de trahir l’engagement, pris il y a seulement deux ans aux Nations Unies et au G8, d’atteindre un montant de financement de la lutte contre le sida au niveau mondial de 10 milliards de dollars annuels.
Aujourd’hui, Jacques Chirac et ses homologues ont refusé de s’engager sur un montant précis de financement européen de la guerre mondiale au sida. Pourtant, le 1er juin dernier au sommet du G8, président français affirmait : «l’Europe, au sommet de Thessalonique, fera, elle aussi, son milliard de dollars pour le Fonds mondial».
George Bush est donc aujourd’hui le seul dirigeant à tenir la promesse faite à l’ONU d’atteindre les 10 milliards, avec la somme – «historique» selon les propres mots de Jacques Chirac – de 3 milliards de dollars par an pour lutter contre la pandémie. Le président français et ses homologues, deux mois seulement après la crise en Irak, laissent ainsi George Bush prendre le leadership absolu sur le terrain de la solidarité internationale, avec toutes les conséquences dramatiques que cela implique pour la lutte contre l’épidémie du sida au niveau international : promotion de l’abstinence sexuelle au détriment du préservatif, imposition par la force de monopoles commerciaux pour les multinationales pharmaceutiques américaines au détriment de la production générique.
Pour Gilles Raguin, de Médecins du Monde, «à Thessalonique, Jacques Chirac et ses homologues européens viennent de refuser d’opérer un véritable changement d’échelle des financements à la lutte contre le sida. C’est une décision désastreuse, et elle va se traduire sur le terrain par des centaines de milliers de morts qui auraient pourtant pu être évitées.» En effet, dans les pays en développement, la pénurie de moyens bloque la mise en place de programmes d’envergure nationale à partir des initiatives pilotes lancées ces dernières années.
Dans le même temps, les politiques promues par le gouvernement américain actuel menacent dans les pays pauvres de nombreux droits essentiels : le droit de promouvoir le préservatif, le droit de recourir aux médicaments génériques, le droit à la santé reproductive (avortement, contraception), tout simplement le droit à la santé. Le défi lancé par George Bush à l’Europe sur le terrain de la solidarité avec l’Afrique imposait donc une réaction et une seule : une contribution européenne équivalente, soit au moins 3 milliards d’euros. «Une fois de plus, Jacques Chirac et les autres chefs d’Etat européens préfèrent sacrifier des principes fondamentaux plutôt que de mettre la main à la poche et sauver des vies» commente Dominique Audouze du Planning Familial.
Pour Gaëlle Krikorian d’Act Up-Paris «ce que Jacques Chirac et ses collègues viennent de montrer, en refusant d’allouer comme Bush 3 milliards à la la lutte contre le sida, c’est que pour l’Europe, la vie de 40 millions de personnes ne vaut pas 0,03% du PIB».