Suite à un zap et à un rendez-vous arraché dans la foulée, nous avions obtenu d’Anne Hidalgo une invitation à être reçuEs au comité de pilotage qu’elle dirige sur les prostitutions à Paris. Compte-rendu et état des lieux d’une question que la Mairie de Paris continue à traiter par le statu quo et l’opacité.
Notre entrevue a eu lieu le 28 mars, avec des associations ayant été amenées à travailler avec des prostituéEs. La réunion était censée traiter de la prise en charge des prostituéEs. Elle s’est en fait soldée par une consultation successive de chaque association présente, sans conclusion ni débat (contrairement à ce qui était annoncé dans l’invitation au comité de pilotage) et ce, dans une situation de dialogue unilatéral.
Le comité de pilotage a prouvé l’opacité de son fonctionnement : hormis les membres de l’équipe d’Anne Hidalgo et quelques personnes associées, la moitié de nos interlocuteurs n’était pas identifiable, faute de présentation des personnes. Les associations invitées ont ainsi appris qu’elles fournissaient à leur insu des informations à la Préfecture et à la Brigade de Répression du Proxénétisme. De même, il nous a été impossible de connaître, à part des mesures déjà énoncées, les objectifs exacts du comité de pilotage, ni d’avoir la moindre idée d’un calendrier d’action.
En guise de réponses, nous avons eu droit à des formules vides, dont on se demande jusqu’à quel point Anne Hidalgo peut elle-même y croire : son but est en effet de «construire avec les acteurs de terrain» et elle nous a invitéEs à un séminaire pour «évaluer ce que nous faisons ensemble». Elle nous a par ailleurs opposé qu’elle et ses collègues n’étaient «pas là pour répondre à nos questions, mais [qu’ils étaient là] pour échanger» (sic). Anne Hidalgo se fait donc une idée saugrenue du dialogue, qui n’est manifestement pas la nôtre, et qui dissimule mal sa volonté de maintenir la prise en charge de la prostitution à Paris par le statu quo, c’est-à-dire selon ses propres partis pris idéologiques, tout en donnant à ses décisions l’apparence d’un travail avec les associations.
Anne Hidalgo n’entend par ailleurs toujours rien à nos revendications, pourtant simples. Ainsi, elle continue à refuser la présence de prostituéEs lors de ces réunions. Elle prend prétexte d’un manque de représentativité et d’une inaccessibilité des personnes, alors qu’une liste de prostituéEs à contacter lui a été remise et qu’un militant d’Act Up-Paris a même proposé de céder sa place à unE prostituéE lors de la réunion du 28 mars. Anne Hidalgo préfère prendre des décisions sur la question en occultant la parole et l’existence des premièrEs concernéEs. Elle poursuit de plus son déni des violences policières : il s’agit pour elle d’exactions dont les prostituéEs «seraient» victimes, et elle se décharge de toute responsabilité à cet égard, ce problème ne rentrant pas selon elle dans son champ de compétence. Elle trahit ainsi les engagements pris lors des annonces publiques du lancement de son comité de pilotage, en même temps qu’elle ôte à ce dernier toute possibilité de servir de cellule de médiation entre prostituéEs et forces de l’ordre.
Enfin, malgré une désolidarisation de principe avec la Loi pour la Sécurité Intérieure de Nicolas Sarkozy, nous aimerions avoir la garantie que les mesures de prise en charge proposées par Anne Hidalgo (programmes de formation professionnelle et d’hébergement sécurisé), qui attestent malgré elle d’une relative capacité d’action, prennent acte de l’urgence de la situation, ne soient pas conditionnées à la sortie de la prostitution et surtout bénéficient dans l’immédiat aux prostituéEs étrangèrEs jugéEs pour racolage et menacéEs d’expulsion.
Qu’Anne Hidalgo se le tienne pour dit, le temps de parole, extrêmement restreint, que nous avons eu lors de cette réunion, l’impossibilité du dispositif à permettre tout dialogue et son incapacité à répondre à nos questions ne sauraient nous satisfaire. Néanmoins, pour poursuivre « l’échange », nous l’avons invitée à notre réunion publique hebdomadaire. A ce jour, elle n’a toujours pas daigné répondre.