Alors que nous nous battons pour faire respecter le droit au séjour pour raison médicale, nous devons faire face, depuis peu, à une dangereuse remise en cause de la protection des malades étrangèrEs contre les mesures d’éloignement.
Le 15 juillet dernier la Préfecture de Seine-et-Marne expulsait un séropositif camerounais, au mépris de la loi et en pleine connaissance des conséquences qu’aurait cette expulsion sur son état de santé. En effet, la préfecture avait été alertée par la Cimade sur sa situation médicale et les problèmes d’accès aux soins au Cameroun et aurait dû, en application de l’article 25-8° (lire l’article Le difficile accès au séjour pour soins), le libérer immédiatement du centre de rétention administrative où il était détenu. Alors qu’il avait été saisi par l’intéressé, le Tribunal administratif de Melun s’est rendu complice de cette condamnation criminelle en la confirmant. La semaine suivante, la Préfecture de police de Paris et la Préfecture des Pyrénées-Atlantique s’essayaient, elles aussi, au renvoi de séropositifVEs dans leurs pays d’origine. A chaque fois, il a fallu que les Tribunaux administratifs de Paris et de Pau annulent ces mesures de reconduite à la frontière, parce que ces préfectures refusent d’appliquer la législation en vigueur sur les étrangèrEs malades.
Le 9 août, craignant que la décision du Tribunal administratif de Melun ne pousse les préfectures à remettre en cause l’inexpulsabilité des malades étrangerEs, Act Up-Paris et l’Observatoire pour le droit à la santé des étrangerEs (ODSE) exigeaient des Ministères de la Santé et de l’Intérieur qu’ils organisent le retour en France de Monsieur N., expulsé le 15 juillet dernier, et qu’ils dénoncent les tentatives préfectorales de renvoi. Nos demandes n’ont pas été entendues. Par leur silence et leur inaction, ces Ministères cautionnent ces pratiques. Depuis, les tentatives d’expulsion ne cessent de se multiplier, notamment à Paris où le 8ème bureau des étrangerEs, administration en charge de l’éloignement, ne libère plus les malades retenuEs au centre de rétention administrative, malgré les annulations systématiques que prononce le Tribunal administratif contre leurs arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière.
En septembre dernier, le Ministère de l’intérieur est sorti de son inaction complice pour participer activement à l’éloignement d’étrangèrEs malades. Il a notamment organisé l’expulsion de Monsieur K, tunisien séropositif au VHC résidant en France depuis l’âge de six ans. Monsieur K. faisait l’objet d’un arrêté ministériel d’expulsion depuis le 11 janvier 1995 mais, du fait de son état de santé et des conséquences qu’entraînerait pour lui une telle mesure, le Ministère de l’intérieur l’avait assigné à résidence en septembre 2000, et bloquait ainsi la mise en œuvre de son expulsion. Pourtant, le 13 septembre 2004, Monsieur K., alors incarcéré à la maison d’arrêt de Nancy, reçoit une lettre de la Préfecture de Meurthe-et-Moselle l’informant que le Ministère de l’intérieur envisage d’abroger son assignation à résidence et que cette décision entraînerait son expulsion à sa sortie de prison une semaine plus tard. Malgré la pression des associations de santé et de défense des droits des étrangèrEs, malgré les preuves matérielles transmises au Ministère, malgré la nécessité pour Monsieur K. de rester sur le territoire français compte tenu de son état de santé, Dominique de Villepin a persisté dans sa politique néoraciste et criminelle et a expulsé Monsieur K. le 29 septembre 2004.
Act Up-Paris exige de Dominique de Villepin le retour des malades étrangèrEs qu’il a personnellement expulséEs ou laissé expulser, et l’abandon de sa politique d’expulsion qui bafoue le droit à la santé des étrangèrEs.