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Les organisateurs du XIVème congrès international sur le sida, ont clairement marqué leur volonté d’accorder une place majeure aux débats sur l’accès aux traitements des pays pauvres. Cependant, ils n’ont pas hésité à jouer les borgnes, refusant de consacrer suffisamment de temps à un problème majeur pour plus de la moitié des séropositifs de cette planète : la coinfection VIH-hépatites. Le Congrès Mondial sur le sida a entretenu le non-dit criminel sur la coinfection.

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Barcelone, capitale catalane, ville européenne avant-gardiste a acceptée de se compromettre dans l’échec de l’organisation de ce congrès. Pour débuter en délicatesse, suite à la cérémonie d’ouverture, un banquet de bienvenue réunissait les 18.000 participants dans les jardins en contrebas du Palais St Jordi. Mais pour les 40 handicapés en fauteuil la soirée s’est déroulée sur le plateau ; ils se sont contentés de contempler cette soirée mondaine du haut des 14 marches sans rampe d’accès. Cet oubli est révélateur mais ne sera pas le seul.

Un article dans la presse nationale espagnole rappelait qu’à Barcelone 70% des séropositifs VIH sont infectés au moins par une hépatite virale. La majorité des contaminations VIH et VHC est là-bas hélas encore d’origine stupéfiante, la réduction des risques en est encore à ses débuts en Espagne. Les autorités sanitaires “ croyantes ” hésitent toujours à autoriser l’échange de seringues en prison. Et tout comme la prévention, les nouveaux traitements sont aussi peu accessibles, c’est le cas du PEG-interféron, au coût exorbitant et aux faibles résultats chez les coinfectés VIH.

Sur les cinq jours du programme officiel, seules ont été prévues une session sur la coinfection de deux heures et demi, une conférence satellite d’une heure et demie organisée par Schering-Plough, et une présentation de l’essai RIBAVIC de l’ANRS qui devait durer 15 minutes. Pour l’organisation de la conférence, quatre heures quinze devaient suffire pour exposer la bombe qu’est la coinfection et à quel point personne n’est d’accord avec les résultats des essais prometteurs du voisin.

riri

La session avait pourtant un mini-programme intéressant où il n’a été redit que des choses acquises depuis deux ans au moins. La seule nouveauté était le bilan des essais de greffes du foie chez les coinfectés. Cela paraît faisable, et surtout pas plus risqué que de laisser une cirrhose qui dégénère chez un séropositif. C’est une bonne nouvelle, mais la salle hésite encore. Il va falloir pourtant admettre que si la chirurgie nous à longtemps été interdite pour des raisons allant des risques de contamination des chirurgiens aux coût / bénéfices / risques défavorables, aujourd’hui de nombreuses opérations de routine sauvent quotidiennement la vie de nombreux séropositifs du Nord.

fifi

La conférence satellite de Schering-Plough était tout bonnement consternante. Une débauche de moyens techniques, une salle de 500 places et nous n’étions pas 60, mais nous pouvions répondre en direct grâce aux télécommandes numériques dernier cri, aux colles que nous posait le très gentleman Dr Soriano. Il était dans son fief et n’a donc pas hésité à jouer le beau brun série Z, tout en n’arrivant pas à nous faire croire qu’il s’intéressait à ce qu’il disait. Et d’ailleurs, nous non plus. La présentation des essais était conforme aux habitudes américaines avec d’immondes statistiques ou les noirs et les jaunes sont comparables en terme de réponses virologiques. Son homologue américain, n’a pas relevé le niveau, projetant en une seule diapositive les 185 types d’effets secondaires dus à l’interféron. Il commente par “ Il faut faire attention ”, mais no more. Comment faire attention ? Avec quels moyens prévenir ? entourer ? accompagner ? Il n’en dira rien. Mais, le sommet de la bêtise, c’est quand on se rend compte que le débat annoncé, n’est en fait réservé qu’aux cinq mandarins à la tribune. Ils se passent la parole comme prévu lors des répétitions avec le laboratoire. Ils sont là pour vendre du PEG-interféron sauce chorizo. Les malades, c’est pas leur souci aujourd’hui, revenez demain, si vous êtes encore là.

loulou

Le surlendemain, il a fallu forcer le passage pour arriver à la salle où était prévue la présentation de RIBAVIC. Juste après, avait lieu une conférence capitale avec la participation de Bill Clinton himself. Le Dr Christian Perrone a essayé de relever le défi de cette présentation, sachant le retard déjà pris. Il en était à trois minutes et cinq diapositives quand le modérateur lui fait signe. Le service d’ordre de Bill Clinton vient d’arriver et se met en place. Nous assistons donc à la présentation des résultats du plus grand essai international en matière de coinfection, en quatre minutes vingt deux secondes, neuf diapositives et quelques fous rires nerveux. Le Dr Perronne descend de l’estrade serein, il lui tarde de retrouver ses malades ailleurs que dans un cirque.