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Du sang, du sperme, etc. C’est dans ces fluides corporels que Frank Kirchhoff, de la clinique universitaire d’Ulm en Allemagne, s’est attaché à identifier d’éventuels composants naturels inhibant ou facilitant l’infection par le VIH.

Du sang

En partant d’échantillons sanguins humains que son équipe a fractionnés par des méthodes biochimiques une collection de plusieurs centaines de fractions. Chacune a été évaluée par un test approprié réalisé en laboratoire sur des cellules humaines en culture. A partir d’une fraction active pour prévenir la production virale cellulaire de cellules infectées, les chercheurs ont réussi à identifier la protéine responsable de cette activité. Il s’agit d’un fragment d’une protéine présente en grande quantité dans le sang, l’alpha 1-antitrypsine. Ce fragment de 20 acides aminés bloque l’entrée du virus dans la cellule.

Comparé à l’activité du T-20 (Fuzéon©) parfois prescrit dans le traitement du VIH, le fragment baptisé VIRIP (pour Virus Inhibitor Peptide en anglais) est nettement moins puissant. Toutefois des variants de sa séquence en acides animés produits par synthèse s’avérèrent aussi puissants que le T-20, ce qui pourrait en faire des candidats pour des traitement. Au dire du chercheur, un de ces variants pourrait rapidement déboucher sur des premiers essais cliniques. L’étude plus fine du mécanisme moléculaire ici en jeu a conduit l’équipe à proposer le nom d’inhibiteur d’ancrage (anchoring inhibitor en anglais) pour le distinguer des inhibiteurs de fusion comme le T20.

Du sperme

En utilisant la même méthode à partir d’échantillon de sperme, les chercheurs ont pu identifier un autre fragment qui, quant à lui, facilite et amplifie l’infection des cellules par le virus du sida. Ce fragment provient de la phosphatase acidique de la prostate, une protéine produite par la prostate et que l’on retrouve en grande quantité dans le sperme et dans le tractus génital féminin après un rapport sexuel où elle reste détectable pendant deux jours.

Le fragment identifié correspond aux acides aminés 248 à 286 et augmente de plusieurs dizaines de fois l’infection virale d’un grand nombre de cellules en culture. Par rapport aux travaux récemment publiés dans la revue Cell, le chercheur complète la pertinence de la découverte en illustrant l’effet amplificateur de ce fragment sur des cellules ou des tissus humains susceptibles d’être infectés. Bien sûr cela reste des expériences de laboratoires, et un modèle plus proche de la réalité, chez l’animal est en cours.

Dans le contexte actuel d’une polémique autour du niveau de charge virale dans le sperme et du niveau de contamination, les résultats quantifiés par l’équipe allemande font réfléchir si tant est qu’ils soient transposables en dehors du tube à essai. En effet, le fragment identifié qui est baptisé SEVI pour Séminar-derived Enhancer of Virus Infection ou amplificateur de l’infection virale dérivé du sperme, permet d’augmenter d’un facteur 1000 voir 100 000 la capacité d’infection de particules virales présentes même en très faible quantité. Jusqu’alors il semblait que des quantités très importantes de virus étaient nécessaires en laboratoire pour infecter une cellule et lui permettre de produire du virus de manière effective. En présence du SEVI, une à trois particules virales suffisent pour infecter de façon productive une cellule en culture.

L’histoire ne serait pas complète si on omettait de retracer un rebondissement dans cette découverte. Afin de travailler aisément avec leurs fragments, les chercheurs ont voulu le synthétiser. S’empressant de l’évaluer, ils constatèrent que le produit était inactif. Mais un nouvel essai le lendemain fonctionna ! Ceci s’explique par la capacité du fragment à changer de conformation. Comme d’autres protéines, il forme ce que l’on appelle des fibres amyloïdes. Or ce n’est que dans cette conformation que le SEVI agit. Ainsi, la découverte de ce fragment pourrait présenter un intérêt en matière d’intervention sur la prévention de la transmission du sida si l’on réussirssait à bloquer cette formation.

Et puis quoi encore ?

Le laboratoire d’Ulm passe encore au crible de la fragmentation de nombreux tissus et fluides humains. De nombreux nouveaux fragments intervenants dans l’inhibition ou la facilitation de la transmission du VIH restent sans doute encore à découvrir.