En octobre dernier un exploitant parisien signataire de la charte de responsabilité a mis à
disposition son établissement, pour une soirée « TOTAL BAREBACK » (dédiée au sexe sans
capote). La promotion de cette soirée s’est faite sur un site internet et au-delà puisque de
nombreuses personnes de la communauté étaient informées sans pour autant avoir eu besoin de
s’inscrire sur ce site bareback.
Dans ce contexte, le collectif souhaite aujourd’hui rappeler à tout établissement qu’en étant
signataire de la charte, il s’engage à respecter les consignes de prévention (mise en place des
outils de prévention capote & gel, vidéos safe, point d’information…) et d’en assurer un suivi
permanent. De cette application matérielle de la Charte, il semble évident pour les associations
membres du collectif qu’il en découle également une dimension morale à laquelle adhère
implicitement tout établissement signataire. Or, la mise en place de cette soirée nous montre que
cela aura échappé à au moins un établissement… Cela, nous ne le tolérons pas, et à juste titre, car
la communauté que nous voulons est une communauté responsable.
Le nombre de nouveaux diagnostics VIH en 2007 est de 6 500 cas dont 38% parmi les gays.
Globalement la tendance est légèrement à la baisse, sauf pour notre communauté. En effet, la
prévalence des nouveaux diagnostics du VIH y est près de 100 fois supérieure à la population
générale. 2500 hommes gays ont découvert leur séropositivité cette année.
Ces chiffres continuent de traduire un dérapage et une banalisation des pratiques à risques dans
notre communauté. C’est pourquoi dans tous les commerces de sexe, l’accès à la prévention doit
être permanent et sans ambiguïté.
Quelle crédibilité avons-nous si d’un côté nous mettons en place un dispositif de prévention qui,
de l’autre, serait bafoué par la complaisance à l’égard du sexe à risque ou la promotion de
pratiques sexuelles non safe ?
Nous, associations membres du collectif, nous refusons de faire le jeu de l’épidémie.
Mais au-delà, nous demandons à l’ensemble de nos établissements qui disposent de backrooms
d’être responsables, acteurs mobilisés et partenaires dans la lutte contre le sida et les autres IST,
auprès de l’ensemble de leurs clients et auprès de la communauté.
Que l’on soit séronégatif, séropositif, ou séro-interrogatif, la pratique du sexe à risques n’est pas
sans conséquences pour notre santé, et ceci, quel que soit le statut déclaré de son ou ses
partenaire(s).Le VIH dans la communauté touche aujourd’hui près d’un gay sur cinq. Là où l’on
estime que près de la moitié des contaminations a lieu avec un partenaire primo-infecté, sepensant alors séronégatif, pratiquer le sexe sans capote, c’est participer directement à la
progression de l’épidémie.
Et c’est sans aborder ici les possibilités beaucoup plus grandes de contracter d’autres IST comme
la syphilis, la gonorrhée ou encore certaines hépatites. En plus d’être reconnues comme cofacteurs
d’infection au VIH, elles sont bien souvent asymptomatiques et font beaucoup moins
l’objet d’un dépistage. Difficile de les éviter dans le cadre de rapports à risques.
Etre séropo et baiser sans capote, c’est aussi s’exposer à des complications de santé
importantes. L’épidémie récente d’hépatite C le prouve et les dangers ne sont pas nuls. Dans le
cadre d’une co-infection VIH/Hépatite C, concilier une tri-thérapie avec un traitement à
l’interféron est un véritable calvaire. Et, encore une fois, c’est sans évoquer ici les potentielles
surcontaminations par d’autres souches résistantes du VIH qui peuvent conduire à une mise en
échec des traitements.
Enfin, ce n’est pas parce que l’on doute de son statut sérologique que cela doit être une
raison pour prendre des risques sexuels. La solution reste la mise en place de pratiques safe, et le
recours régulier au dépistage, pour toutes les raisons évoquées ci-dessus.
Nous souhaitons aussi continuer à encourager tous les gays qui pourraient rencontrer des
difficultés dans leur prévention à se rapprocher de toute structure associative, quelle qu’elle soit,
afin de pouvoir en parler.
Notre action ne vise qu’à améliorer encore le dispositif et le partenariat, afin que la Charte reste
un label de qualité et de confiance pour les clients. Le collectif invite tous les établissements à
prendre conseil auprès d’un des membres du collectif, pour envisager les solutions visant à
l’amélioration permanente de l’application de la Charte.
Nous continuerons à encourager, à soutenir et à faire la promotion des établissements qui luttent
contre le sida. Nous continuerons également à conduire vers un mieux ceux qui voudront qu’on
les aide en ce sens. Mais nous ne tolèrerons pas que des établissements commerciaux, qui se
disent aussi « communautaires », fassent le jeu de l’épidémie en organisant des soirées bareback.
L’engagement réel et permanent des établissements dans cette démarche indispensable à la
communauté est, pour eux, à long terme, un moyen de préserver leurs droits acquis.