5 000 nouvelles contaminations par an en France, plus de 500 000 personnes déjà contaminées, des milliers de mortEs par an, dont une majorité d’usagerEs de drogues. Ce ne sont pas les chiffres du VIH du début des années 90, mais ceux de l’hépatite C des années 2010.
Face à ces chiffres terrifiants, les pouvoirs publiques, arc-boutés sur leur position répressive, sont incapables de proposer de nouvelles mesures. Dans le dernier plan Hépatites du gouvernement, la seule recommandation pour prévenir les contaminations Hépatite C chez les usagerEs de drogues était… de ne pas se droguer. C’est la raison pour laquelle ce plan a été rejeté par les associations et la commission nationale addiction. Car face à ce virus, plus contaminant et plus résistant que le VIH, mais aussi pour lequel il n’existe pas de vaccin et dont les traitements ne marchent que dans 50% des cas, il faudrait non seulement renforcer les mesures de réduction des risques existantes, mais aussi expérimenter de nouveaux modes d’intervention. Le message «une seringue = un shoot» qui a marché pour le VIH ne suffit plus. Pour se protéger efficacement du VHC, il faut non seulement une nouvelle seringue à chaque shoot, mais aussi renouveler tout le petit matériel (eau stérile, filtre, cuillère…) lui aussi potentiellement contaminant. Et encore faut il se shooter dans des bonnes conditions, et sûrement pas dans la précarité de la rue, qui rajoute des situations d’urgence et de prise de risques. C’est pour cela qu’il faut apprendre aux usagerEs à se droguer et procurer aux usagerEs précaires des endroits pour le faire proprement. L’installation d’un modèle de salle de consommation lors de la journée mondiale Hépatites le 19 mai 2009, destinée à exposer un des outils de réduction des risques qui pourrait répondre à ces enjeux a fait bouger quelques politiques et médias, mais aujourd’hui, à la veille de la prochaine journée contre les hépatites, il n’y a toujours rien de concret. Cette épidémie silencieuse n’intéresse personne. Pouvoir public, mais aussi médias, tous le monde s’en fout. Les raisons ? La réduction des risques VIH pour les usagerEs de drogues a pu exister parce que les usagerEs pouvaient coucher avec la population «saine» et la contaminer. Mais le VHC se transmet principalement par le sang, et non par le sexe, comme le VIH. Tant que les usagerEs se contaminent entre eux en échangeant leur matériel de consommation, c’est une «punition méritée» pour avoir osé se droguer. Une autre particularité du virus, c’est qu’il met longtemps avant de tuer. Les personnes contaminées dans les années 80 commencent seulement à mourir de cirrhose ou de cancer du foie. 20 ans pour mourir, ce n’est pas très vendeur médiatiquement. Et comme si cela ne suffisait pas, l’hépatite C s’ajoute souvent au VIH : 35% des personnes infectées par le VIH le sont aussi par le virus de l’hépatite C. Leur prise en charge est une spécialité à part entière, souvent méconnue, avec des médicaments anti-VHC antagonistes aux médicaments VIH. De plus, les personnes co-infectées sont exclues des essais thérapeutiques de nouveaux médicaments, alors qu’elles sont parmi celles qui en auraient le plus besoin. Après avoir envoyé au casse-pipe du VIH toute une génération d’usagerEs de drogues dans les années 80, les pouvoirs publiques reproduisent aujourd’hui les mêmes atrocités, les mêmes négligences avec l’hépatite C, toujours pour les mêmes raisons de «guerre à la drogue». La ministre de la Santé, Roselyne Bachelot-Narquin et le pape de la répression à la française et président de la MILDT, Etienne Apaire, en sont les premiers responsables.