L’incarcération au titre de la détention provisoire d’un septuagénaire malade est l’occasion de rappeler que les personnes malades et âgées n’ont rien à faire en prison, que les mécanismes d’alternatives à l’incarcération sont insuffisants et difficilement appliqués. Surtout, ils excluent les personnes prévenues alors même que la détention provisoire est un outil répressif qui nie la présomption d’innocence.
Sortir les malades de prison : impossible en cas de détention provisoire !
Outre la suspension de peine pour raison médicale, notre système pénal prévoit des aménagements de peine pour les personnes âgées et les malades. Prenant acte de l’insuffisance de ces mécanismes, la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 a institué une procédure de suspension de peine pour raison médicale d’urgence et a ouvert la libération conditionnelle aux personnes condamnées de plus de 70 ans.
Mais ces dispositifs excluent de leur champ d’application les personnes incarcérées alors qu’elles n’ont pas encore été condamnées ! [[articles 720-1-1 et 729 du code de procédure pénale]]. C’est ainsi qu’un homme vient de se faire incarcérer alors qu’il a 73 ans, qu’il est malade et qu’il n’a pas été condamné qu’il est donc présumé innocent.
En finir avec la détention provisoire
Tout milite contre la détention provisoire :
– Des principes éthiques : la détention provisoire, c’est la peine avant la condamnation. Compte tenu du principe de présomption d’innocence, nul n’est juridiquement coupable tant qu’il n’a pas été condamné par un tribunal. En démocratie, l’enfermement avant condamnation pose un problème éthique fondamental.
– Des abus dans l’application : en théorie, « toute personne mise en examen, présumée innocente, demeure libre » ; si nécessaire, elle peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire, c’est seulement à titre exceptionnel que la détention provisoire trouve à s’appliquer [[article 137 du code de procédure pénale, renforcé par la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009]]. Or, en France, la justice y a recours de manière abusive, quasi-systématique. Sur une année, 61% des 90 000 personnes incarcérées en France le sont au titre de la détention provisoire. La France s’est fait condamner à de multiples reprises par la Cour européenne des droits de l’Homme pour son usage de la détention provisoire totalement contraire aux droits humains : incarcération de masse et délais complètement disproportionnés.
– L’inégalité face à la justice : il est avéré qu’une personne qui comparaît déjà incarcérée a statistiquement plus de risques d’être condamnée à de la prison ferme– si elle est reconnue coupable – que celle qui comparaît libre, le tribunal ayant alors plus aisément recours aux peines alternatives à l’incarcération.
– Des conditions d’incarcération inhumaines pour les prévenuEs : ce sont les personnes placées en détention provisoire qui ont à connaître des plus mauvaises conditions de détention puisqu’elles sont incarcérées en maison d’arrêt. Celles-ci sont les établissements pénitentiaires les plus surpeuplés, les plus insalubres, les plus mortifères.
Qu’importe les raisons pour lesquelles une personne est enfermée au titre de la détention provisoire : c’est un scandale en soi, à plus forte raison quand cette personne est malade et âgée.
Act Up-Paris exige l’institution immédiate de dispositions permettant à toute personne risquant la détention provisoire de faire valoir son état de santé ou son âge comme contre-indication à l’incarcération.
Act Up-Paris exige l’abolition de la détention provisoire, violation manifeste de la présomption d’innocence.