Nous aussi, nous avons nos palmes, nos Césars, nos Awards. Il était temps que cela se sache. Au mois de septembre 2009, Act Up-Paris décerne : la capote rose (avec réservoir), la gélule d’Or, la crosse « Inspecteur Harry », le prix Hamilton du bon goût et le Bouquet final
– La capote rose (avec réservoir) à Françoise Barré-Sinoussi, pour la fin de son discours lors de la cérémonie d’ouverture de la 5e Conférence internationale de l’IAS sur le VIH au Cap, en Afrique du Sud. Le début de son discours était sympa, aussi, mais terminer, quand on est prix Nobel de médecine, en enfilant le tee-shirt de TAC, l’association de séropos activistes d’Afrique du Sud, et en interpellant avec force les pays riches sur la baisse des financements, cela mérite largement une telle récompense. Notons au passage que, là où le jury du prix Nobel a mis près de 25 ans à saluer l’action de Françoise Barré-Sinoussi, Act Up-Paris, toujours à la pointe de l’actualité, ne met que quelques semaines.
– La gélule d’Or à l’International Aids Society, pour la façon dont ses responsables ont permis aux activistes de porter leur combat lors de la même conférence, et pour les discours de ses co-présidents lors de la cérémonie d’ouverture.
– La crosse « Inspecteur Harry » à Eric Favreau, journaliste de Libération, pour son flair, qui lui a permis d’écrire en juillet 2009 que le Fonds mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose manquait d’argent pour assurer la continuité de ses financements. 9 mois avant, il rédigeait un article sur le CA du Fonds de New Delhi, qui avait dû voter des coupes de 10 à 25 % dans les financements, article très pertinemment intitulé : « La lutte contre le sida et la malaria résiste à la crise ». Tant de perspicacité laisse pantois.
– Le prix Hamilton du bon goût au laboratoire Tibotec, pour la déco de son stand, le déjà célèbre baobab du sida : quatre bâtons géants de guimauve un peu sales, et recourbés, à 2 mètre du sol, formant les branches d’un « arbre » dont les fruits sont des photos géantes de personnes, de toutes les couleurs, épanouies, aimantes, heureuses. « Ce ne sont pas des séropositifs, nous confie un responsable du stand, c’est la représentation de l’universel. » Ben tiens. Il aura fallu deux jours d’efforts ininterrompus à Tibotec pour ériger cette chose. On comprend que les dirigeants n’aient ni le temps, ni l’énergie de penser à diminuer le prix du darunavir en Afrique.
– Le bouquet final, qui explose toutes les limites et transcende les catégories, est décerné à l’INPES, pour sa dernière campagne sur les IST, la plus affligeante jamais réalisée. Alors qu’un pédé sur 5 est séropo, que le sida et les IST ne marquent pas le pas que des campagnes de prévention fortes et pertinentes sont urgentes et nécessaires, l’INPES a choisi… De faire des leçons de vocabulaire et de nous expliquer l’acronyme. C’est vrai, la plèbe sans culture, dans les dîners mondains, ne cessait de nous casser les oreilles avec leur chaude-pisse. Enrichissons donc leur vocabulaire, et prenons-les, vraiment, pour des cons : donc, IST, ce n’est pas un « inimitable sumo en tutu » ou un « insecte superteigneux ». On continuera donc à se choper des IST (puisque on ne nous dit pas comment se protéger), on n’ira pas les dépister, ni les faire soigner, mais au moins, on saura ce que c’est. Merci, l’INPES (Insondable Nullité des Politiques d’Eradication du sida).