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Hier lundi 5 mars au lendemain du 10ème anniversaire de la loi Kouchner sur la suspension de peine, Act Up-Paris, ainsi que des membres du journal et de l’émission radio L’Envolée, ont manifesté devant le ministère de la justice, en soutien au prisonnier Thierry CALVY co-infecté VIH/VHC que la justice laisse mourir à petit feu à la centrale d’Arles.

Nous avons demandé à être reçuEs par un responsable, mais nous n’avons eu droit qu’au mépris et à l’intervention rapide de la police qui nous a expulséEs de la place Vendôme pour nous emmener, sous bonne escorte, jusqu’au métro Tuileries.

Act up Paris et les cosignataires de ce communiqué de presse ne comptent pas en rester là, tant que Thierry CALVY ne sera pas libéré !

photo_action_act_up_ministere_de_la_justice_LE_5-03-2012_-_copie.jpg Lettre de Thierry CALVY co-infecté et longue peine incarcéré à la centrale de Arles
J’ai déposé une demande de suspension de peine début janvier auprès du juge d’application des peines du TGI de Tarascon (…) Me concernant ça fera 30 ans que je suis séropositif, évidement je n’ai pas échappé au VHC (…)
Je prends la même trithérapie depuis 1995. J’ai fait un infarctus coronarien et, on m’a placé deux « stents » (…) J’en ai un peu marre que l’on me parle de « pronostic vital engagé », puisque pour survivre je dois prendre ma trithérapie et aussi mon traitement cardiaque sans lequel bien sûr je ne serai plus de ce monde (…) je pense que mon pronostic vital est engagé depuis longtemps.
Je ne veux pas attendre et déclencher quelque chose de grave puis finir comme un légume dans un UHSI, dans un mouroir quoi ! (…) dans mon esprit si je devais me retrouver dans cette situation je mettrais un terme à ma vie. Par trois fois déjà j’ai fini à l’hôpital car je me suis pendu (…) ça fait 30 ans que je suis touché par le « VIH-VHC » et depuis 7 ans j’ai ce problème cardiaque, mon cœur est abîmé sur 45% de sa surface (…) j’ai des problèmes musculaires, sans parler des effets secondaires etc.… j’ai 49 ans mais je sens bien que plus ça va et plus je suis fatigué (…) je suis actuellement touché par trois pathologies graves et il me reste 15 ans de prison à faire (libérable en 2027), et je vais irrémédiablement vers de très graves problèmes de santé, je risque aussi de refaire un infarctus, toute personne raisonnable sait très bien que je ne tiendrais pas le coup (…)
Je vis tous les jours ce cauchemar en souhaitant très fort que l’on trouve une solution (…) ils veulent quoi de plus, je totalise 25 ans ferme de détention, il faudrait peut-être que je fasse les 15 prochaines années, ce qui me ferait 40 ans de détention ! (…)

Thierry CALVY. SALE ANNIVERSAIRE
10 ans que la loi Kouchner sur la suspension de peine existe et elle n’est toujours pas respectée ! Pourtant cette loi du 4 mars 2002, stipule que les détenus dont le pronostic vital est engagé, ou la pathologie durablement incompatible avec le maintien en détention, doivent être libéré. Or en 2012 il n’en est rien ! Bien au contraire puisque 10 ans de circulaires et lois ont rendu encore plus difficile la libération des malades incarcérés.
Octobre 2003 : circulaire ministérielle concernant la loi sur la suspension de peine ajoute une condition supplémentaire « sauf s’il existe un risque grave de renouvellement de l’infraction »
Février 2005 : Dominique PERBEN, garde des sceaux, réclame publiquement une contre expertise pour un bénéficiaire de la suspension de peine.
Septembre 2005 : amendement limitant la suspension de peine en cas de « trouble exceptionnel à l’ordre public ou s’il existe un risque particulièrement élevé de récidive »
10 mars 2010 : les juges d’application des peines peuvent désormais ordonner la réincarcération d’un libéré en suspension de peine sur le seul prétexte « qu’il existe un risque grave de renouvellement de l’infraction » Seule la loi pénitentiaire de novembre 2009 accélère le processus de libération, mais seulement pour les prisonniers en phase terminale, « désormais, en cas d’urgence et lorsque le pronostic vital est engagé, le juge d’application des peines peut ordonner la suspension de peine sur la seule base d’un certificat médical du médecin UCSA (médecin de la prison) ». Concernant cette dernière modification, les juges d’application des peines semblent ne jamais appliquer cette mesure d’urgence en réclamant toujours des expertises.
Alors 10 ans après la loi Kouchner, qu’en est-il des malades condamnés à de longues peines comme Thierry CALVY ?
Le cas de Thierry CALVY, exemple parmi d’autres, est dramatique, comme on peut le lire dans son courrier. Il est incarcéré à la centrale d’Arles, co-infecté VIH/VHC depuis 29 ans (souffrant aussi de graves problèmes cardiaques).
Condamné à une peine de 25 ans (il n’est libérable en 2027) il a purgé que 8 ans sur sa peine. Ce prisonnier a donc déposé sa première demande de suspension de peine il y a 15 jours, en raison de la dégradation de son état de santé qui, au vu de son témoignage, est incontestablement incompatible avec son maintien en détention. Sa demande comme il le dit a peu de chance d’aboutir compte tenu de la difficulté d’obtenir une mesure de suspension de peine selon les critères en vigueur actuellement et au vu de sa situation médicale, puisque son pronostic vital n’est pas « assez » engagé, sans parler de son passé judiciaire qui ne plaide pas en sa faveur puisque qu’il est juridiquement en « récidive légale ».
En effet la loi Kouchner, qui a connu 5 restrictions depuis son existence, n’est systématiquement appliquée que si deux expertises médicales concordantes indiquent que « le pronostic vital est engagé » autant dire qu’elle n’est réservée qu’aux mourants.
Thierry CALVY fait donc partie de ces prisonniers condamnés à une mort lente et atroce simplement parce que la loi n’est pas appliquée entièrement et ne tient pas compte du critère d’«incompatibilité durable avec le maintien en détention», pourtant inscrite dans la loi depuis 2002 jamais retenue par les juges.

Les associations, à l’occasion des 10 ans de la loi Kouchner, exigent la libération de Thierry CALVY ainsi que de tous les prisonniers malades et exigent que leurs soient accordés les aménagements de peine et la suspension de peine pour incompatibilité durable avec le maintien en détention.