Après des années de lutte intense des associations trans, rassemblées notamment autour des revendications du collectif Existrans, l’assemblée nationale vient de voter ce mardi 12 juillet un texte qui affirme vouloir mettre fin à l’exigence d’attestations et d’expertises médicales ou psychiatriques dans les procédures de changement de mention de sexe à l’état civil.
Nous resterons mobiliséEs et vigilantEs pour que cet objectif soit systématiquement respecté dans les demandes de CEC des personnes trans. Surtout, nous dénonçons le blocage systématique du gouvernement pour empêcher une procédure de CEC libre et gratuite en mairie qui seule serait à même de répondre avec certitude à cet objectif, en respectant réellement l’auto-détermination des personnes, comme préconisé par le Défenseur des Droits.
NON, Monsieur Binet, le tissu associatif trans français n’a JAMAIS demandé à faire l’impasse sur la déjudiciarisation de nos changements d’état civil. Vous affirmez avec aplomb que « Dès le début de nos discussions, nous avons, en accord avec les associations, écarté l’idée de la déclaration devant l’officier d’état civil ». Or, dès notre courrier interassociatif envoyé aux parlementaires fin 2015 et cosigné par la quasi totalité des associations trans, nous recommandions exactement l’inverse de ce que vous prétendez défendre en notre nom. Et nous n’avons eu de cesse de le répéter depuis.
Dans le texte voté le 12 juillet, le législateur laisse à nouveau la place à l’arbitraire du juge au centre de nos vies. Mais ni les psychiatres, ni les médecins, ni les juges ne sauront jamais mieux que les personnes concernées qui elles sont et comment elles doivent être identifiées à l’état civil. L’autodétermination n’est pas un principe négociable !
Au-delà de l’impact symbolique et concret de l’appréciation aléatoire des juges sur la légitimité des demandes de CEC, nous nous inquiétons aussi de la durée des procédures devant le tribunal de grande instance, pratiquement impossible à encadrer comme nous l’avons expliqué à maintes reprises. Nous continuons donc d’exiger la seule solution réellement rapide : un changement d’état civil auprès de l’officier d’état civil sur simple déclaration comme c’est le cas dans d’autres pays comme l’Argentine, le Danemark, la Colombie, l’Irlande, et dernièrement la Norvège.
Nous regrettons aussi l’exclusion de la procédure des mineurEs, en dehors des mineurEs émancipéEs. Elle donne un très mauvais signal aux parents et aux autres adultes qui entourent les enfants trans, alors même que ces enfants ont besoin de tout le soutien de ces adultes et de la société pour vivre librement et sereinement leur transidentité. De la même manière, les personnes nées à l’étranger doivent pouvoir bénéficier de procédures semblables aux personnes nées en France et adaptées à leurs situations particulières, pour que leurs prénoms et mention de sexe soient modifiés suivant leurs besoins sur leur titre de séjour. Le combat des associations trans continue pour que l’autodétermination des personnes, nos corps et nos identités soit enfin respectés !
Nous rappelons enfin que nous avons travaillé depuis le mois de juillet 2015 auprès du Défenseur des Droits et qu’il a lui-même suivi nos recommandations sur le changement d’état civil dans sa décision cadre du 24 juin 2016. Ces recommandations s’appuient non seulement sur l’histoire de nos luttes depuis plus de 15 ans, mais aussi sur ce que les associations, les experts juridiques, les chercheurs ont analysé et documenté : un CEC dépsychiatrisé et déjudiciarisé est non seulement possible, mais nécessaire, pour lutter efficacement contre les discriminations et permettre aux personnes trans de sortir de la précarité, d’avoir un meilleur accès aux soins, à l’éducation, au marché du travail.