Act Up et la prévention politique
Depuis que nous existons, nous agissons à plusieurs niveaux pour lutter contre le VIH-SIDA et les discriminations qui font le lit de cette épidémie. Nous nous efforçons de dénoncer les nombreuses contradictions politiques et sociales qui entravent l’accès réel à la prévention, tout en apportant à notre échelle des réponses concrètes et innovantes pour nos communautés. La colère et l’information sont nos meilleurs atouts !
Malgré une diversification des possibilités de se faire dépister, d’être accompagné et de se faire traiter efficacement, les mesures sociales souvent répressives, discriminantes, stigmatisantes, voire culpabilisantes, ne permettent pas aux populations les plus exposées au VIH-SIDA d’y avoir accès. C’est le cas pour les travailleurSEs du sexe, pour les usagerEs de drogues, pour les personnes migrantes et/ou sans-papiers, pour les personnes incarcérées. Mais c’est aussi le cas dans les DROM où les populations n’accèdent pas aux innovations pourtant mises en place en métropole, faute de volonté politique.
D’autres raisons existent : manque de moyens humains, lourdeurs administratives, financements en baisse, casse de l’hôpital public etc. Or pour rendre effectif sur l’ensemble du territoire des dispositifs de prévention rien ne doit être laissé de côté et les principes de la démocratie sanitaire doivent être respectés.
Le système de dépistage (en CeGIDD, en laboratoire de ville ou dans un centre de santé sexuelle d’approche communautaire) et le dépistage associatif, fortement impactés par la crise sanitaire liée au Covid-19, sont aujourd’hui les piliers de la prévention.
Nous sommes convaincues que les contaminations restent à un niveau élevé en raison de l’insuffisance du dépistage, de l’information et de l’accompagnement.
La prévention auprès des plus jeunes est notoirement insuffisante et les conséquences sont alarmantes. Les connaissances sur le virus sont en recul chez tous les jeunes. Au collège et au lycée, les quelques heures accordées au sujet ne suffisent pas et ne remplissent pas l’obligation légale d’au moins trois séances d’éducation à la sexualité par an. Surtout, cette prévention tente de tenir compte de la diversité des sexualités et des identités de genre face aux offensives de plus en plus réactionnaires contre les cours d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle. Les contaminations par le VIH ont triplé chez les jeunes gays en l’espace de 10 ans, signe que les jeunes ne se sentent pas concernés par un virus ayant touché les ainéEs de la communauté et qui fait partie du passé à leurs yeux. Pourtant, on ne guérit toujours pas du sida.
Ce qu’il faut retenir :
En France, le nombre total de personnes ayant découvert leur séropositivité au VIH a été estimé entre 4 233 (estimation « basse ») et 5 738 (estimation « haute ») pour 2022, dont 54% sont hétérosexuelLEs (38% néEs à l’étranger et 16% néEs en France) et 41% sont des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (27% nés en France et 14% nés à l’étranger). L’âge médian est de 37 ans : 14% étaient âgées de moins de 25 ans, 64% de 25 à 49 ans et 22% de 50 ans et plus. La proportion des plus de 50 ans, qui s’était stabilisée autour de 20% entre 2014 et 2017, a eu tendance à augmenter depuis.
Toujours en France, environ 25 000 personnes ignorent leur séropositivité, sur 180 000 séropositifVEs. Le dépistage est tardif – 3 ans en moyenne après la contamination chez les HSH, 5 ans dans l’ensemble de la population – alors qu’un dépistage précoce permet une prise en charge rapide et une mise sous traitement. Cela a deux conséquences :
- Être dépisté tardivement, c’est avoir de moins grandes chances de succès thérapeutique,
- Alors que les traitements permettent à une personne séropositive en succès thérapeutique de ne plus être contaminantE (TasP : treatment as prevention), les personnes qui ignorent leur statut sérologique sont susceptibles de transmettre le VIH. Ce sont ces personnes qui ignorent leur séropositivité qui engendrent des contaminations chaque année.
Toutefois, ces données sont à prendre avec des pincettes car les données de surveillance épidémiologiques ne sont pas robustes depuis quelques années et elles ne reflètent pas avec exactitude la réalité de l’épidémie.