Actualisé le 19/11/2024

Ici, nous centralisons des ressources sur le chemsex, des messages de réduction des risques et des dommages (RdRD) en matière de santé sexuelle et des réflexions politiques sur l’usage de prods dans nos sociabilités. Cette page a vocation à être régulièrement mise à jour pour tenir compte des préoccupations de nos communautés.

Très présente dans la communauté gay et pédé, la pratique du chemsex, contraction de chemicals et de sex en anglais, désigne la recherche de plaisirs et de performances sexuelles associée à la consommation de substances psychoactives, qu’elles soient licites ou illicites. Ces substances incluent notamment celles de la famille des cathinones (méphédrone, 4-MEC, 2-MMC, 3-MMC, 4-MMC, MDPV, 3-CMC, NRG-2, alpha-PHP…), des stimulants, ainsi que d’autres drogues de synthèse comme la cocaïne, la MDMA, le GHB/GBL ou encore la tina. Sans oublier l’alcool, bien sûr. Les modes d’administration sont divers : par voie nasale (sniff), par voie anale (booty bump), par inhalation, par ingestion ou par injection intraveineuse (slam). Le chemsex se pratique la plupart du temps dans des lieux privés ou en sex-club, en milieu festif, à deux ou à plusieurs et les risques de contamination au VIH et au VHC sont très élevés.


CHEMS ET NOUS : MIEUX COMPRENDRE = MIEUX VIVRE

Lorsqu’il est question de la pratique du chemsex, on se retrouve rapidement face à une multitude d’informations et de questionnements, tant sur le plan individuel que collectif. Les approches qui privilégient le soin communautaire – dont certaines ont été développées durant les années « de cendre » de l’épidémie de sida – ainsi que l’empowerment et les savoirs expérientiels à l’ère des outils numériques, apparaissent comme les plus aptes à développer des réponses concrètes et pragmatiques.

Pour te guider, nous pouvons commencer par partager quelques conseils. Ils te permettront ensuite de mieux cibler les informations que tu cherches et d’identifier les outils spécifiques qui répondent à tes besoins.

>> La prise répétée et sur de longues périodes (supérieure à 12h) implique une maîtrise de ta consommation et des produits pris à côtes ou en support.

>> Connaître la composition des produits que tu utilises, leurs dosages, ainsi que leurs interactions potentielles avec d’autres traitements avant toute consommation, car chaque substance possède ses propres caractéristiques.

>> Connaître le cadre légal liés à l’usage de stupéfiants et s’informer sur les accompagnements possibles.

>> Avoir un comportement respectueux et responsable, notamment en groupe lors d’un “plan chems”.

>> Le chemsex peut faire rentrer la consommation de produits dans une routine quotidienne. Elle peut modifier nos comportements vis-à-vis du sexe et peut créer des comportements addictifs.

>> Stigmatiser, dénigrer, culpabiliser des gays qui pratiquent le chemsex ne fait qu’aggraver la situation.

>> Si tu as des doutes, n’hésite pas à en parler avec des professionnels en santé communautaire spécialisés dans le chemsex, les addictions et la réduction des risques.

REDUIRE LES RISQUES, C’EST IMPORTANT !

À chaque produit utilisé correspond des pratiques de réduction des risques et des dommages (RdRD) pour éviter le surdosage et les expériences traumatisantes. De même, il est important de savoir quoi faire au bon moment.

  • Ne jamais rester/consommer seul.
  • Le respect du consentement est non négociable.
  • Noter les produits que tu prends et espacer les prises le plus possible.
  • Faire tester les produits, par exemple avant une sex party.
  • Des pipettes, pour mesurer ses doses de G, et des roule ta paille pour le sniff sont souvent distribuées dans les lieux de santé communautaires et par les associations comme AIDES et Act Up.
  • Éviter les mélanges de différents produits qui peuvent être dévastateurs pour ton corps, ta santé mentale et ta vie sociale. Par exemple, ne jamais boire d’alcool avant, pendant et après la consommation de GHB/GBL pour éviter les risques de G-hole.
  • Se faire dépister au moins tous les trois mois si tu pratiques régulièrement le chemsex et notamment dans le cadre de certaines pratiques comme le booty bump qui peut être très abrasif pour ton cul.
  • Les risques d’infections VIH et co-infections à l’hépatite B et C sont très importants. En cas d’injection, bien désinfecter la zone d’injection, bien filtrer les produits et ne pas partager ton matos.
  • Éviter de consommer de multiples produits dépresseurs (Kétamine, GBL/GHB, alcool, benzodiazépine, MXE, opiacés) cela pourrait facilement provoquer des surdoses et des dépressions respiratoires.
  • Appeler immédiatement les secours (Samu : 15 et Pompiers : 18 ou le 112) en cas de perte de connaissance et même dans le doute d’une overdose.

Pour éviter les mélanges et la prise consécutive de produits, tu peux mettre en place, par exemple, une feuille de consommation sur le frigo ou un tableur Excel. C’est la façon la plus simple d’espacer ta consommation, de la réguler dans le temps si besoin et de mieux la comprendre pour en parler à unE professionnelLE de santé.

Les sessions de sexe sous prod peuvent entraîner des conséquences ponctuelles ou durables sur tes relations et ta vie sociale. L’intensité offerte et la possibilité de multiplier les partenaires et les pratiques permettent de dépasser les stigmates ou les barrières en société. Elles rejoignent les multiples possibilités de rencontres via des applis comme Grindr et les milieux festifs. Cependant, il est important de se rappeler que ces expériences peuvent avoir des répercussions sur la santé physique, mentale et émotionnelle. Si tu ressens une perte de contrôle ou une détresse, n’hésite pas à demander de l’aide auprès d’un professionnel de santé ou d’une association spécialisée. Préserver ton bien-être est toujours une priorité.

N’oublie pas que le silence est notre pire ennemi. Parler de sa consommation, exprimer ses questionnements, informer son entourage si l’occasion se présente, c’est souvent libérateur quand on est bien accompagné.

ON NE LE DIRA JAMAIS ASSEZ : UN OUI EST UN OUI, UN NON EST UN NON

Les substances psychoactives consommées, censées amplifier les sensations et le plaisir, peuvent aussi altérer le comportement et rendre impossible l’expression d’un consentement éclairé. Le non respect du consentement entraine des conséquences graves : emprise, modification du comportement, risque de contamination au VIH, VHC et autres IST, désinhibition, viols, violences sexuelles, traumas etc. Il est donc essentiel de rester vigilant à chaque instant. Assure-toi que ton consentement éclairé sera respecté tout au long d’un plan chems. De même, adopte un comportement responsable et respectueux envers tes partenaires.

La pratique du chemsex a permis de mettre en lumière les témoignages de chemsexeurs concernant les violences sexuelles subies dans le contexte des sex-party liées à cette pratique. Dans la continuité du mouvement « #MeToo », ces violences, bien qu’existantes, demeuraient jusqu’alors taboues, invisibilisées voire silenciées. Elles trouvent en partie leur origine dans une homophobie profondément ancrée, qui tend à nier la possibilité même d’abus sexuels entre hommes gays, comme si l’orientation garantissait automatiquement une attirance mutuelle et le consentement à des relations sexuelles.

La peur des forces de l’ordre, la crainte du jugement, des poursuites judiciaires ou encore des réactions homophobes constituent autant d’obstacles à une prise en charge adéquate des victimes de violences sexuelles dans ce contexte.

Si tu es séropositifVE

  • prends correctement ton traitement, il te permettra de contrôler ta charge virale pour ne pas exposer tes partenaires à un risque de contamination,
  • consulte régulièrement un centre de santé communautaire, ton médecin traitant ou un soignant spécialisé dès lors que tu as été en contact ou que tu présentes des symptômes d’IST.

Si tu es séronégatifVE

  • dépiste toi tous les trois mois pour le VIH, les hépatites et les IST,
  • informe tes partenaires en cas d’infection,
  • réduis au maximum les risques de contamination,
  • utilise la PrEP si tu en ressens le besoin ou que tu as une sexualité généreuse,
  • renseigne-toi auprès de ton partenaire sur son statut sérologique si tu penses que le sujet est facile à aborder et protèges-toi s’il n’est pas sous traitement ou qu’il ne connaît pas son statut,
  • consulte des associations et des professionnelLEs de santé communautaires.


DES ADRESSES UTILES …

Il est important de ne pas rester seul dans sa consommation et ses questionnements. Le chemsex peut rapidement affecter ta vie relationnelle et affective, ton entourage proche et professionnel, ton mental, ta santé, tes repères du quotidien.

>> Les CAARUD (Centres d’Accueil et d’Accompagnement à la Réduction des Risques pour les Usagers de Drogue) sont les établissements médico-sociaux de première ligne en matière de réduction des risques. Ils fournissent du matériel d’injection ou de sniff stériles ainsi que de l’information sur les produits et la réduction des risques.
>> Les CSAPA (Centres de Soins, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie) te permettent de consulter gratuitement, d’être suivi et d’être accompagné en cas d’arrêt. Il en existe dans toutes les régions de France.
>> Les CeGIDD (Centres Gratuits d’Information, de Dépistage et de Diagnostic) offrent la possibilité de se faire dépister anonymement et gratuitement pour le VIH et les autres IST. Ils permettent également d’obtenir une prescription pour la PrEP ou un traitement d’urgence post-exposition (TPE).
>> Les CSSAC (Centre de Santé Sexuelle d’Approche Communautaire) proposent une offre de santé sexuelle dédiée aux personnes LGBTQIA+ et aux travailleurSEs du sexe, sur le modèle anglo-saxon de la Dean Street clinic de Londres. Il en existe 4 en France (voir la rubrique Dépistage).
>> L’association ENIPSE (Équipe Nationale d’Intervention en Prévention et Santé pour les Entreprises) est engagée dans la prévention et la promotion de la santé, notamment en milieu festif et professionnel. Spécialisée dans la lutte contre le VIH et les autres IST, et les conduites à risque, elle travaille en collaboration avec les établissements de nuit, les entreprises, et les acteurs de santé. L’ENIPSE propose des interventions de sensibilisation, des formations et oriente les personnes concernées vers des lieux de prise en charge.
>> Le Samu : à contacter uniquement en cas d’urgence au 15 (7 jours sur 7 et 24h/24).

… ET DES RESSOURCES EN LIGNE

Les ressources qui existent sont complémentaires et elles peuvent te servir pour y voir plus clair dans ta pratique. Sans jugement, sans stigmatisation : s’informer pour mieux comprendre.

Sexosafe.fr : Sexosafe propose une page intitulée « Chemsex et slam : comment se protéger ? » qui regroupe des informations utiles, ainsi qu’un épisode de son podcast, où interviennent un usager, un accompagnant associatif et un médecin spécialisé en addictions.

Fetez-clairs.org : met à ta disposition du matériel de réduction des risques et des flyers à télécharger.

Chemsex.be : site belge d’information et de réduction des risques pour les hommes qui ont des relations sexuelles avec des hommes qui pratiquent le chemsex et pour les professionnelLEs de santé. La conception du site a été inspirée du projet Friday/Monday du Terrence Higgins Trust (THT), la principale association de lutte contre le VIH-SIDA au Royaume-Uni.

Technoplus.org et son application mobile : pour consulter des flyers dédiés aux produits et à leurs interactions.

Kepsmag.fr : média en ligne de référence sur la santé, la fête et la culture liées aux drogues et à la sexualité, en n’oubliant jamais les risques et les plaisirs. Le projet KEPS fait partie de l’association de santé le Bus 31/32 basée à Marseille. Tu peux retrouver pas mal d’infos sur le chemsex sur leur chaîne YouTube.

Info Chemsex : un groupe d’entraide et d’auto-support créé sur Facebook par l’association AIDES qui offre un espace d’échange avec d’autres personnes vivant des expériences similaires.
Groupe Autosupport Chemsex (AIDES) sur Telegram : t.me/AIDESChemsex
Ligne d’écoute WhatsApp – Info Chemsex (AIDES) au 07 62 93 22 29, une équipe répond dans les 24h du lundi au vendredi, avec proposition d’entretien téléphonique si besoin.

Chillout Visio Abstinent, tous les jeudis de 18h30 à 19h30 (bit.ly/ChilloutAbstVisio) : Groupe de parole en visio pour les personnes ayant arrêté, souhaitant arrêter ou mettre en pause leur pratique du chemsex.

Drogues Info Service : drogues-info-service.fr / Par téléphone : 0 800 23 13 13, de 8h à 2h, 7 jours sur 7 (appel anonyme et gratuit)

INFORMATION=POUVOIR
– Douglas Crimp, Melancholia and Moralism, 2002
Chemsex : quels enjeux pour la prévention ? (reactup.fr, 2018)
Renouveler l’approche de la santé sexuelle des gays à travers le chemsex (reactup.fr, 2019)
– Johann Zarca, Chems, 2021
Rapport « Chemsex » du Pr Amine Benyamina remis le 17 mars 2022 au Ministère des solidarités et de la santé
– Chemsex, podcast diffusé sur Radio France, Les Pieds sur terre, décembre 2023
– Chemsex, accros au sexe sous drogues, documentaire de Léa Ménard, France 3 Paris IDF, 2023
Le chemsex n’est pas une affaire de morale, mais de politique, texte de Thierry Schaffauser pour Manifesto XXI https://manifesto-21.com/chemsex-nest-pas-une-affaire-de-morale-mais-de-politique/
– Chemsex, retour sur 15 ans d’usages de drogues en contexte sexuel, 2024
https://www.ofdt.fr/actualite/chemsex-retour-sur-15-ans-d-usages-de-drogues-en-contexte-sexuel-2423
– Swaps Europe : Chemsex dans 8 villes d’Europe, été 2024, consultable ici
– « Aller vers les chemsexeurs : guide d’implantation d’une offre pluridisciplinaire« , 2024, par AIDES et la Fédération Addiction