épidémie cachée – malades ignorés
Des courbes en chute libre, des histogrammes qui s'effondrent, des séries de chiffres décroissants : lorsqu'on jette un coup d'oeil rapide sur le Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire, il ne faut pas longtemps pour se convaincre que l'épidémie de sida est maîtrisée en France. Illusion d'optique. Lorsqu'on délaisse les évolutions semestrielles de l'épidémie au profit d'une analyse à long terme, lorsqu'on compare, sous les résultats globaux, sa propagation dans les différentes populations, lorsqu'on casse la nomenclature obsolète des « groupes de transmission » (homosexuel, hétérosexuel, toxicomane) par une comparaison plus fine des situations sociales, on découvre une toute autre épidémie. On apprend par exemple, sous la diminution du nombre de nouveaux cas de sida, une augmentation constante du nombre de malades. Ou bien, sous le recul généralisé des infections opportunistes, une stabilité alarmante du nombre de personnes qui ne découvrent leur séropositivité qu'aux premiers symptômes du sida. Ou encore, derrière la baisse générale de la mortalité, de scandaleuses disparités entre Français et étrangers, entre cadres et ouvriers, entre hommes et femmes. On découvre en somme, sous les données épaisses que l'Etat publie de manière rituelle, une épidémiologie plus gênante qu'il rechigne à rendre publique. Reléguées à l'arrière-plan, ces données dessinent pourtant le vrai visage de l'épidémie. Aujourd'hui, Act Up-Paris les dévoile.