La régularisation pour raisons médicales prévoit la délivrance d’une carte de séjour temporaire. Néanmoins, trop de malades étrangèrEs se voient enferméEs dans des statuts administratifs précaires telles que des Autorisations provisoires de séjour. Il s’agit d’une véritable mise en danger des malades étrangèrEs. À moins de pouvoir bénéficier de réseaux de solidarité privés, ils et elles se retrouvent sans ressource, et sans logement. Dans de telles conditions, survivre est un combat quotidien.
Éviter le 115
A en croire certainEs travailleurSEs sociauxLES, il n’y a plus de place d’hébergement nulle part et les seules alternatives à la rue sont les foyers d’urgence du 115. Néanmoins, éviter le Samu social est le premier défi des malades sous APS. Ces foyers d’urgence sont des dispositifs qui n’accueillent les personnes que pour la nuit, selon des horaires très contraignants. Les personnes y sont parquées dans de grands dortoirs et doivent avoir quitté les lieux très tôt le matin. Si, pour touTEs les sans-abriEs, ces foyers constituent des lieux d’invisibilisation et de désintégration sociale, pour ceux et celles qui sont malades, il s’agit d’une véritable mise en danger de leur vie. Et pourtant, de nombreuxSES travailleurSEs sociauxLES persistent à y envoyer des malades et les dirigent vers des dispositifs d’accueil de jour qui inscriront chaque jour les personnes sur les listes du 115, et assureront le transport en navette du foyer d’urgence au centre d’accueil de jour. Bref, tout est mis en place pour que des malades restent ainsi hébergéEs pendant des mois dans des conditions inacceptables.Trouver un hébergement plus adapté
Il existe pourtant d’autres dispositifs, comme les Centre d’hébergement et réinsertion sociale (CHRS), les foyers post-hospitaliers, ou même certains hôtels sociaux parmi les moins pires. Ces dispositifs sont loin d’être parfaits, et les problèmes qu’ils posent diffèrent d’un endroit à l’autre : L’instabilité.La plupart de ces dispositifs ne peuvent héberger une personne que pour un délai restreint : souvent quelques mois, quelques semaines, et parfois même quelques jours. Un équipement très variable.
Dans ces dispositifs, l’équipement est souvent très sommaire. Par exemple, il est rarement possible de se faire à manger (jamais dans les hôtels sociaux). Dans certains, il semblerait que l’hygiène soit en option, puisque les douches y sont payantes alors qu’ils accueillent des personnes sans ressources. Ajoutons à cela l’exiguïté, l’insalubrité et la vétusté de certains locaux, en premier lieu desquels les hôtels sociaux. Perte d’autonomie et de vie privée.
Dans certains centres, les contraintes horaires sont très strictes. Dans d’autres il est impossible d’en sortir sans prévenir l’administration, pour demander un billet de sortie. Dans tous les cas, il est impossible de passer la nuit avec unE ou des amantEs.
Pallier le manque de ressources
À ces contraintes s’ajoute l’absence de ressource : sans autorisation de travail, ni possibilité de percevoir la moindre allocation (à l’exception de l’Aide spécifique à l’enfance), les malades sous APS ne peuvent compter que sur l’aide humanitaire de quelques associations et fondations. Cette aide se concrétise le plus souvent par des chèques-service, et se limite en moyenne à 5 tickets de 4 euros pour une période d’une semaine à 10 jours. Si cette somme est dérisoire pour s’acheter de quoi cuisiner et s’alimenter convenablement, elle est carrément indécente lorsque l’on est logéE dans un dispositif où il est impossible de se faire à manger. Il faut alors se rabattre sur les associations offrant une restauration à heure fixe, surmonter la difficulté de se déplacer, qui est bien réelle, compte-tenu du coût des titres de transport. Cela s’ajoute à l’impossibilité de téléphoner qui nuit aux personnes dans les nombreuses démarches administratives qu’elles doivent effectuer.Échapper aux écueils de l’action humanitaire
Dans ces conditions, il devient très difficile de faire entendre aux travailleurSEs de ces structures humanitaires les exigences minimales de survie : les problèmes de nutrition, la nécessité d’avoir un titre de transport ou une carte téléphonique. C’est ainsi qu’une militante d’Act Up qui demandait des tickets-service de plus s’est vue répondre : « ne vous plaignez pas, avec tout ce qu’on fait pour vous. Vous n’auriez pas cela dans votre pays. » Il s’agit, certes, d’un exemple extrême, mais qui reflète bien un des principaux écueils de l’action humanitaire. Dès lors que les malades précaires sont excluEs du dispositif de droit commun, ils et elles ne peuvent compter que sur les structures humanitaires, avec toute l’asymétrie des rapports humains que cela implique : les malades ainsi assistéEs n’ont d’autres droits que celui de remercier. Les travailleurSEs sociauxLES se contentent trop souvent d’orienter les personnes dans leurs démarches administratives et sociales, sans pour autant leur donner une vision d’ensemble des démarches à effectuer. Pourtant, face au labyrinthe administratif français, aux discriminations dues à l’origine et au statut sérologique, et dans certains cas au choc que constitue l’arrivée dans un pays inconnu, ou encore la barrière de la langue, le premier objectif pour les malades étrangèrEs et précaires reste l’empowerment : retrouver la maîtrise de sa vie en récupérant l’information nécessaire.Dénoncer la responsabilité des pouvoirs publics
Être constamment maintenuEs dans des dispositifs d’urgence et d’extrême précarité n’est pas sans incidence sur l’état de santé des malades. Pour autant, il ne faut pas se tromper de cible, les premiers responsables de cette situation restent les pouvoirs publics. Nous continuerons à dénoncer les dérives de certaines structures humanitaires et/ou assistantEs sociauxLES, et à exiger une meilleure formation de ceux et celles-ci, mais nous n’oublions pas que les problèmes que nous rencontrons sont avant tout liés à des politiques et des pratiques administratives.Act Up-Paris exige
Nous demandons aux travailleurSEs sociauxLES de ne pas céder à la résignation, de ne pas accepter l’inacceptable (comme envoyer des malades au 115), et surtout de se mobiliser avec nous pour : – La régularisation de touTEs les sans-papièrEs.La réglementation actuelle en matière de séjour ne fait que produire de la précarité en enfermant les étrangèrEs dans des zones de non-droit et des statuts administratifs précaires : situation irrégulière, Autorisation provisoire de séjour, assignation à résidence, statut des demandeurSEs d’asile. – L’amélioration et l’augmentation des dispositifs d’hébergement.
Bien trop souvent, les pouvoirs publics font appel à des hôtelièrEs – véritables marchandEs de sommeil – qui louent des chambres insalubres, inadaptées et hors des normes de sécurité. L’incendie du 15 avril dernier de l’hôtel de l’Opéra, en est la scandaleuse démonstration. – Un véritable plan de lutte contre la pauvreté et l’exclusion.
Aucune politique de prévention de la pauvreté et de l’exclusion ne pourra se faire sans la revalorisation des minima sociaux (RMI[[Le Revenu minimum d’insertion n’est accessible aux étrangèrEs qu’après cinq années de titres de séjour avec autorisation de travail.]], AAH[[ L’Allocation adulte handicapé n’est accessible aux étrangèrEs qu’avec un titre de séjour. Or une APS n’est pas considérée comme un titre de séjour.]], etc.) et leur extension à touTEs les résidentEs en France, en premier lieu desquelLEs les étrangèrEs et les moins de 25 ans. – L’augmentation du parc de logements sociaux.
Parce qu’il est aujourd’hui de plus en plus difficile d’obtenir un logement social, de nombreuses personnes vivent durablement dans des structures d’hébergement d’urgence. Ceci engorge des dispositifs qui ne devraient être envisagés que comme des solutions temporaires. Une construction massive de logements sociaux est nécessaire, mais en attendant et dans l’urgence, il convient de transformer les PLI, logements sociaux destinés aux classes moyennes et qui trouvent difficilement preneurSE, en PLA et PLA-TS, logements sociaux destinés aux plus pauvres.